Une Aventure BDSM à Berlin

Nous avons souvent entendu parler de Berlin comme étant la "capitale du BDSM" : "Les berlinois sont plus libres que les français, le fétichisme y est plus populaire…" Il n'en fallait pas moins pour éveiller notre curiosité, attiser nos fantasmes et prendre nos billets d'avion. Petit récit de nos aventures berlinoises, et des lieux que nous avons découvert durant ce périple d'une semaine…

Derrière le béton : les roses…

Nous aimons être questionnés, bousculés ou fascinés : c'est un moteur de vie et de notre relation. C'est certain : Berlin a ravit nos âmes aventurières toujours en quête de découvertes insolites et inattendues. Nous avons été frappés par son architecture, imposante et austère. Le style est-allemand, est, disons, tout en nuances de gris ! Et pourtant, derrière le béton, des roses sauvages poussent sur le trottoir.

Derrière cette première impression esthétique, nous comprenons vite l'influence et le poids de l'histoire de cette ville, en grande partie détruite en 1945, divisée en deux par le Rideau de fer, morcelée par des forces d’occupation, reconstruite à la hâte pour reloger les survivants de la seconde guerre mondiale. Cet héritage, qui donne à berlin des airs de grande dame déchue et austère, est aussi le terreau de l'émergence de sa culture underground, d'une scène artistique et d'un mode alternatif qui se sont développés dans la partie occidentale de la ville et ses logements vétustes. Entre art, musique, communautés et squatteurs , la scène confinée derrière le Mur de Berlin a fait la part belle à la sub- et pop culture dont les leaders sont David Bowie, Nick Cave, Joy Division ou la Neue Deutsche Welle (Nouvelle Vague allemande)…

Au début des années 1970, le mouvement des squats a également façonné la ville : des communautés de personnes de tous âges, engagées politiquement, s’approprient de manière illégale des lieux, la plupart du temps à l’abandon et voués à la destruction, et les restaurent pour y habiter et y vivre en autogestion. À cette époque, les anarchistes berlinois ont élu domicile dans le quartier de Kreuzberg, qui se trouve dans le secteur américain, et qui ne comptera pas moins de 80 immeubles ou anciennes usines squattés à la fin des années 1980. C'est dans ce quartier, à Kreusberg, qu'après une ou deux journées de visites touristiques "incontournables", nous avons passé la plus grande partie de notre temps… Aujourd’hui Kreuzberg reste avec Friedrichshain les quartiers berlinois les plus alternatifs, peut-être même les derniers. Hauts lieux de street art, audacieux, sauvage, irrévérencieux et intelligent, et de ce célèbre "mode de vie plus libre" d’une partie des habitants du quartier.

Tout aussi étonnante est la friche industrielle du R.A.W. implantée dans le quartier de Friedrichshain. Après plus de cent ans d’utilisation par les chemins de fer allemand, le site du R.A.W. offre un immense espace au cœur de la ville accueillant un grand complexe dédié aux domaines de l’art, de la culture, de la musique, de la fête et des loisirs depuis plus d’une vingtaine d’années. Mais il semblerait que ces sites undergrounds soient aujourd'hui en péril. Le slogan de la ville fut pendant longtemps « Berlin est pauvre mais sexy », est-ce toujours le cas aujourd'hui? Berlin a été rattrapée comme beaucoup de villes par le phénomène de la gentrification, un processus entrainant avec lui la fermeture des squats et des lieux alternatifs. La vie nocturne, autre caractéristique du Berlin underground, atteste encore de la belle époque reflétée par l’existence d’une grande variété de bars et de clubs atypiques qui font la réputation de la capitale. Cependant, ils sont menacés eux aussi d’expulsion s’ils logent sur un terrain intéressant de près les pléthores d’investisseurs qui rebattissent la ville. Ils incarnent pourtant, au même titre que les autres lieux alternatifs, l’âme de Berlin…

Berlin en version Kinky

Trêve de Berlineries, parlons BDSM ! Après tout, c'est bien pour cela que nous y étions… Flânerie dans les nombreux sex-shops et boutiques spécialisées, achat de nouveaux gants en latex, immersion dans des soirées à thème, location d'un donjon BDSM… Nos aventures de nuit ont été tout aussi riches en émotions…

Nous nous rendons à l'INSOMNIA, club emblématique de la capitale où libertins cosmopolites, urbains, fêtards polymorphes et autres noctambules font la fête ensemble au rythme palpitant de la nuit. L'INSOMNIA est un véritable univers parallèle hédoniste. Des DJ internationaux et berlinois ponctuent l'atmosphère extatique avec une musique allant de la techno, l'électro, la house au gothique. Nous faisons la queue devant l'entrée, fascinés par l'attitude décomplexée et enthousiaste des créatures qui nous entourent, vêtues de cuir et de latex en pleine rue, éclairés par les néons d'un kébab de l'autre côté du trottoir. Nous entrons dans un sas pour nous changer et payer notre entrée, (stupéfaits par les tarifs bien plus bas que ceux pratiqués en France !) A aucun moment ce soir-là nous n'avons senti sur nous de regard ni de geste déplacé (et lorsque l'on vous frôle, on s'en excuse…) Il faut savoir qu'ici comme dans les autres clubs de la capitale allemande qu'ils soient BDSM ou pas, tous les styles se mélangent, personne ne se toise ou ne force la drague, les verres ne coûtent pas un rein et la bière est bonne ! Excités et impatients, nous pénétrons dans la salle où tout se passe, entourés d'innombrables formes de vie et d'amour non-conformistes à moitié nus.

Tels deux poissons dans l'eau, enivrés par la musique et l'ambiance, nous nous laissons porter par la soirée… La piste de dance s'enflamme peu à peu, tandis qu'à l'étage et dans les recoins, les plus impatients s'adonnent déjà à quelques plaisirs complices. S. me fesse à l'arrière de la salle, et un troupeau de curieux s'empressent de nous rejoindre, attirés comme des papillons de nuit par le bruit de nos ébats. Nous jouons encore à l'étage, au milieu de corps enchevêtrés, baignant dans cette lueur rouge caressant leurs corps. S. me fait jouir devant ce spectacle, entre caresses et morsure du cuir. Je sens les regards posés sur nous, des regards d'envie, d'excitation… Nous ne quittons les lieux qu'au petites heures de la nuit, pour jouer les prolongations à l'hôtel…

Séjour au BDSM LOFT BERLIN

Sur notre itinéraire BDSM : le BDSM loft Berlin, que nous avons loué pour une journée et une nuit au cœur de la ville. Un donjon aménagé richement pourvu de mobiliers et de nombreux jouets, faisant également office de studio tout équipé et très confortable… A notre arrivée, nous sommes accueillis par une dame qui nous fait visiter les lieux, nous montre les différents meubles et dispositifs de restriction, avant de nous remettre les clefs du loft. Après cet accueil plus que chaleureux et une fois nos affaires posées dans la chambre, nous avons littéralement basculé dans un autre espace-temps pendant près de 24h, nous arrêtant seulement pour subvenir à nos besoins physiques tels que grignoter, dormir quelques heures et utiliser la salle de bain. Cages, table et chaises de restriction, table médicale, matériel de suspension, balançoires et autres mobiliers de torture et de délices : nous avons essayé chacune de ces diaboliques inventions, et atteints des sommets de plaisirs et de douleur jusqu'au bout de la nuit et une partie de la matinée suivante.

Enfermée dans la cage, j'ai attendu, le cul tendu, l'heure de la délivrance. Je suis redevenue animale, proie capturée encore à demie sauvage. Comment est-ce possible de se sentir autant libre en étant enfermée ? A croire que choisir consciemment ses prisons, y consentir pleinement pour un temps donné, accorde cette grâce. A croire que les liens pour lesquels j'ai tendu mes poignets, me délivrent.

Sous la caresse des néons bleus, rouges, verts, sous l'immense miroir qui tapisse les murs et le plafond, je me suis débattue dans mes liens. Tournant sur moi-même sous la morsure de la cravache, de la ceinture, de ses mains, prise au piège de l'objectif et de mon reflet. Des heures, le temps suspendu, à son souffle, et à mon prochain cri.

Ah, la table médicale… Difficile de se débattre ici. Aveuglée, bâillonnée, je me suis abandonnée encore et encore aux délices de ses vices, et à son Amour. Mon corps n'est plus à moi, mes orgasmes ne m'appartiennent plus, il les force encore et encore…

Si vous vous rendez à Berlin, nous ne saurions que trop vous conseiller la location de ce lieu, au charme bdsm bien "allemand" : ici sangles en cuir noir, masques en latex meubles en métal sont à l'honneur loin de l'esthétique "médiévale" française inspirée des méthodes de l'inquisition (qui privilégie plus souvent les mobiliers en bois brut, piloris, velours et chants d'inspiration Carmina Burana). Oui, nous reviendrons à Berlin pour d'autres découvertes, et ne manquerons pas un nouveau petit détour par ce petit loft…

A bientôt pour de nouvelles aventures kinky ;)